Ségolène Royal à Marseille (Discours et vidéos)

Publié le par Désirs d'avenir.org

Le message universel de la France à travers le monde est plus que jamais d’actualité : la liberté, l’égalité et la fraternité.


Ségolène Royal était en meeting à Marseille, jeudi soir, devant quelque 8.000 personnes. Plusieurs personnalités régionales étaient présentes : Michel Vauzelle, président du Conseil régional, Jean-Noël Guérini, président du Conseil général, son directeur de campagne Jean-Louis Bianco mais aussi Edmonde Charles-Roux, la veuve de Gaston Defferre.


"Dans le débat national qui est aujourd’hui dans la dernière ligne droite, c’est un moment historique important, ce soir, fortement symbolique, puisque jour pour jour, du 22 mars au 22 avril, la France va choisir son destin.

Je voudrais d’abord vous dire que je ne veux pas que le 22 avril ressemble au 21 avril. Et pourtant, j’ai senti, pendant ces longues semaines, ces longs mois, de débats participatifs, j’ai senti gronder la colère des Français, j’ai senti que le doute à l’égard de la politique ne s’était pas apaisé. J’ai senti qu’il y avait encore des millions de citoyens qui pensaient ne compter pour rien, qui ne savent pas de quoi demain sera fait, qui s’imaginent encore que la politique n’est qu’une suite de promesses non tenues.

Et c’est pourquoi cette dernière étape est si importante. Et c’est pourquoi ce soir, je veux vous parler avec gravité, parce que vous avez une responsabilité éminente : c’est vous, dans cette salle, vous qui êtes convaincus que la France ne doit pas se tromper dans quelques semaines, c’est vous qui avez la responsabilité d’aller convaincre toutes celles et tous ceux qui attendent désespérément quelque chose qui ne vient pas, toutes celles et tous ceux qui ont désespérément aussi envie de croire à nouveau dans l’efficacité de la politique.

C’est pourquoi, dans cette dernière ligne droite, ce qui est important maintenant, c’est que les choix soient clairs.

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Le choix, aujourd’hui, il est clair. Il est entre la situation actuelle, celle que nous laisse la droite d’une France frileuse, repliée sur elle-même, qui a peur de regarder le reste du monde, et la France que nous devons voir se lever, celle qui considère bien sûr sans naïveté que la mondialisation peut être la pire des choses, mais qu’elle peut aussi être la meilleure des choses si nous savons mettre en place un certain nombre de nouvelles règles du jeu.

Le pacte présidentiel que j’ai construit avec vous, et que je propose aujourd’hui aux Français, avec lesquels je suis maintenant en dialogue direct, c’est justement le changement des règles du jeu.

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Vous voyez qu’il y a une bataille projets contre projets, et nous réussirons aussi à nous redresser dans le cadre des nouvelles règles du jeu, si nous mettons en place, à la place de la culture que la droite défend, la culture de l’opposition de tous contre tous, la culture de la précarisation, les références de la précarisation devrais-je dire pour ne pas dévoyer le mot culture. En face, ce que je vous propose, après vous avoir longuement, patiemment écoutés, parce que je sais que c’est possible, nous devons investir massivement, puissamment, dans la matière grise, dans l’éducation, dans la formation. C’est pourquoi l’éducation, encore l’éducation, toujours l’éducation est au cœur du pacte présidentiel. C’est là notre chance.

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Non, pas de « ouh » dans nos réunions publiques, parce que les Français attendent un débat sur le fond.

Et moi, je veux que nous en donnions l’exemple, parce que les enjeux sont trop forts, parce que la crise démocratique, la crise sociale, la crise économique, la crise éducative, la crise écologique sont trop profondes pour que, aujourd’hui, on accepte de dévoyer le débat politique. L’heure de la vérité va bientôt sonner.

La première de ces vérités, c’est que ceux qui ont laissé la France dans l’état où elle se trouve, avec cet endettement insupportable, avec le déficit des comptes publics, avec toutes les formes de précarité, de brutalité, de violence et d’inégalités, ceux-là ne peuvent pas incarner la France neuve, ceux-là ne peuvent pas prétendre qu’ils feront la rupture, ceux-là doivent assumer leurs responsabilités.

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J’ai entendu les candidats de la droite se moquer des forums participatifs, des jurys citoyens ; je leur dis : la politique, nous allons la réinventer ensemble.

C’est pourquoi je ferai une réforme profonde des institutions. C’est pourquoi je vous appelle, et c’est pourquoi nous ferons la VIe République.

Nous la ferons, cette VIe République, non pas pour avoir le plaisir de mettre un numéro sur la République, mais c'est quelque chose de bien plus profond que cela, c’est un enjeu considérable, c’est tout simplement refonder le lien entre le peuple français et ceux qui les gouvernent. C’est tout simplement redéfinir au nom de quoi la République se remet debout, c’est tout simplement savoir pourquoi nous tenons tant à notre identité nationale, qui n’est pas le monopole de je ne sais quel courant de l’extrême droite. L’identité nationale, c’est nous, c’est tout le peuple français. Et l’identité nationale, c’est d’abord la certitude, et c’est les nouvelles règles du jeu que je vous propose pour la République, c’est d’abord la certitude que les règles sont les mêmes pour tous, quels que soient son origine, son quartier, sa naissance, sa famille, cette garantie de l’égalité réelle. C’est là d’abord le premier fondement de notre identité nationale.

Puis, l’identité nationale aussi, ce n’est pas de savoir d’où l’on vient, et à Marseille qui s’est forgée de tant d’aventures, de tant de mouvements, de tant de peuplements, riches et diversifiés, c’est ici que je peux le dire encore davantage qu’ailleurs, l’identité nationale, ce n’est pas de demander des comptes sur d’où l’on vient, mais c’est de savoir vers où l’on veut aller ensemble. Et c’est cela que je vous propose.

(…)

j’en fais ici le serment, nous réussirons à relancer la machine économique, parce que la principale inquiétude des Français, elle est là : comment, avec de tels déficits, nous allons, demain, pouvoir tenir nos engagements ? Comment, avec de tels déficits et un tel endettement, nous allons pouvoir redresser la France ?

Je vous dis que c'est possible, mais je vous dis aussi que nous réussirons vite, qu’il faudra renouer la confiance, qu’il faudra s’appuyer sur les petites et moyennes entreprises, celles qui attendent des pouvoirs publics parfois si longtemps les aides dont elles ont besoin. Et on le voit ici dans la Région. Nous nous appuierons sur les régions, sur les élus de proximité, et c’est pourquoi, dans la VIe République, il y aura aussi une réforme profonde de l'État, pour qu’il soit plus efficace, plus rapide, c’est ce que les Français attendent, qui lutte contre toutes les formes de gaspillage pour qu’un euro dépensé soit un euro utile, pour que tous ceux qui sont proches du pouvoir, si proches, et qui bénéficient systématiquement des aides publiques alors qu’ils n’en ont pas besoin, que tout ce système de clientélisme soit remis en cause, afin que l’argent public aille bien aux entreprises qui en ont le plus besoin.

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ce que je propose, c’est du donnant/donnant, du gagnant/gagnant, et cela dans tous les domaines de l’intervention publique. Oui, j’aiderai les petites et moyennes entreprises à recruter des jeunes, et notamment les jeunes qualifiés, et les jeunes diplômés, et il y en a sans doute dans cette salle, tous ces jeunes, et cet immense gaspillage, insupportable, c’est cela d’abord qui bloque désespérément la France, ce sont tous ces jeunes au chômage, 25 % de jeunes au chômage, le taux le plus élevé d’Europe, la durée d’attente la plus longue pour accéder au premier emploi, même l’on a fait l’effort d’avoir une qualification ou un diplôme, parce que d’un côté, les entreprises demandent aux jeunes d’avoir de l’expérience professionnelle, mais de l’autre côté, elles refusent de leur donner leur chance.

Alors, ce système-là, il doit changer avec de nouvelles règles du jeu : du donnant/donnant, du gagnant/gagnant, c’est comme cela, vous verrez, que nous allons déployer toutes les énergies aujourd’hui bridées sur l’ensemble du territoire national.

(…)

Pour moi, les jeunes, ce n’est pas un problème, pour moi, les jeunes, c’est une partie, et même une grande partie de la solution. Mais bien sûr, c’est une grande partie de la solution.

On le sait bien, plus d’un an après les émeutes dans les quartiers, rien n’est réglé, au contraire, les choses n’ont cessé d’empirer. Les services publics ont encore reculé, tout a disparu.

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Sur l’identité nationale, comment ne pas dénoncer cet amalgame insupportable entre l’immigration et la menace de l’identité nationale ? Comment accepter ce mélange entre l’immigration régulière, qui se trouve ainsi désignée à la vindicte publique ? Je disais tout à l’heure, mais si tout d’un coup, tous les travailleurs étrangers s’arrêtaient de travailler, on en verrait de drôles de choses dans des secteurs entiers de l’économie !

(…)

La question écologique est étroitement liée à la question de la sortie du sous-développement.

Je voudrais ici l’aborder, là aussi, avec gravité. C’est aujourd’hui la journée mondiale de l’eau.

Il y a à l’échelle de la planète un milliard d’être humains qui n’ont pas accès à l’eau potable. Il y a tous les jours 50 000 personnes qui meurent parce qu'elles n'ont pas accès à l’eau potable. Voilà l’état de la planète aujourd’hui.

Alors l’enjeu de la lutte contre le réchauffement climatique, qui a fait l’objet de tant de discours et de si peu d’action au cours de ces dernières années, oui, la bataille contre le réchauffement climatique est un enjeu considérable, et c’est à vous, à chacun de vous qu’il reviendra de conduire cette lutte.

Il faudra là aussi des décisions courageuses. Il faudra là aussi lutter contre toutes les formes de lobbies, les intérêts financiers, les groupes pétroliers qui encaissent des profits insolents, tout en refusant d’indemniser les communes souillées par exemple par la catastrophe de l’Erika. Les profits des compagnies pétrolières seront taxés, et ces bénéfices seront réinvestis dans les énergies renouvelables. Les énergies renouvelables feront l’objet de politiques volontaristes, déterminées, en en particulier, il appartiendra à la France d’être un pays leader au niveau européen, pour entraîner l'Europe dans ces énergies renouvelables, et non pas comme aujourd’hui, de freiner l'Europe sous prétexte que nous avons l’énergie nucléaire. Cette hypocrisie est devenue inacceptable parce qu’elle nous freine, elle nous empêche, elle nous fait prendre du retard.

(…)

Puisque nous avons parlé de l’identité nationale, et puisque nous sommes à Marseille, je voudrais vous dire un mot de la Marseillaise, parce qu’il y a parfois des malentendus.

J’entends dire des jeunes qui ne comprennent pas : « Mais ce sang impur qui abreuve nos sillons ? »

N’ayons pas de malentendus. La Marseillaise, c’est le chant de la lutte contre toutes les formes de tyrannie, c’est le peuple qui s’est levé contre les forces de l’Ancien Régime, c’est le chant qui a été repris dans tous les pays où il a fallu secouer le joug de l’oppression. C’est le chant que Louise Michel faisait chanter à ses élèves tous les matins et tous les soirs, et à chaque fois, elle qui avait connu la prison et les privations de liberté, à chaque fois, disait-elle, qu’elle faisait chanter la Marseillaise à ses élèves, elle ne pouvait pas s’empêcher de pleurer.

Alors, ne faisons pas de contresens sur ce chant, la Marseillaise. Comprenons vraiment le fond et la force historique de ses paroles. Ce n’est ni un chant sanguinaire ni un chant xénophobe, non, c’est le chant de toutes les libertés, de ceux qui risquent leur vie pour défendre les libertés, c’est le chant de républicains, c’est le chant que je vous propose, ici, à Marseille, de chanter tous ensemble pour ne jamais oublier que le message universel de la France à travers le monde est plus que jamais d’actualité : la liberté, l’égalité et la fraternité.


> Lire l'intégralité du discours

 

 

Ségolène Royal : discours du meeting du Dome de Marseille

(22 mars 2007)

 

Source Désirs d'avenir


Meeting de Ségolène Royal à Marseille : Réactions...


En meeting à Marseille, la candidate a prononcé un discours fort sur l'identité nationale. Kader Arif, Marc Thiercelin, Stéphane Pocrain, Najat Belckacem, Geneviève Couraud, Jean-Louis Bianco, Eugène Caselli, Michel Vauzelle, Patrick Mennucci et Aurélie Filippetti, reviennent sur cet évènement.


Publié dans Divers

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